Lors d’un accident de la route assez grave (blessés graves ou victimes décédées), il est parfois difficile pour les enquêteurs de déceler les circonstances exactes de l’accident et la vraie volonté du conducteur fautif.

Les enquêteurs s’efforcent pourtant à chaque accident de la route d’établir les circonstances exactes de l’évènement, au regard des témoignages recueillis sur la scène, les déclarations faites pendant la garde à vue du conducteur impliqué, les indices matériels retrouvés sur les lieux de l’accident…

Parfois, la volonté du conducteur quant au choc à proprement parlé, reste difficile à déterminer lorsque l’auteur de l’accident connaissait par exemple la victime, ou qu’ils avaient eu un accrochage quelques instants avant le choc à l’origine de l’accident.

La qualification pénale retenue à l’encontre de l’auteur de l’accident peut en effet basculer rapidement vers le criminel.

En matière d’accident de la route, ce sont souvent les chefs de poursuite avec un caractère involontaire qui sont retenus, donc des délits, tels que :

° les blessures involontaires consacrées par l’article 222-19 du code pénal  dispose que“Le fait de causer à autrui, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30000 euros d’amende. En cas de violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à trois ans d’emprisonnement et à 45000 euros d’amende. “

°l’homicide involontaire consacré par l’article 221-6 du Code pénaldispose que : « Le fait de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, la mort d’autrui constitue un homicide involontaire puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000€ d’amende. En cas de violation manifeste délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à cinq ans d’emprisonnement et de 45 0000 euros d’amende.»

Cependant, dans des cas assez rares, le conducteur fautif peut être poursuivi pour un crime et non un simple délit, tels que :

°violences volontaires ayant entrainé la mort sans intention de la donner consacré par l’article 222-7 du Code Pénal,

° ou même encore le meurtre.

Le crime est aggravé par le fait que le véhicule sera considéré comme une arme par destination (Art 132-75 CP).

Les peines encourues sont alors considérables : alors qu’un simple homicide involontaire est puni d’une peine maximale de dix ans d’emprisonnement (Art 221-6-1 CP) toutes circonstances aggravantes confondues (alcool, stupéfiants, vitesse…), les violences volontaires ayant entrainé la mort sans intention de la donner (Art 222-7 CP) sont punies d’une peine de vingt ans de réclusion criminelle et le meurtre par trente ans de réclusion criminelle (Art 221-1 CP).

Dans une affaire récente, le responsable d’un accident de la route comparaissait devant la Cour d’Assises des Hauts de Seine pour des faits de violences volontaires ayant entrainé la mort sans intention de la donner.

Les circonstances de l’accident étaient complexes : une première altercation était survenue en effet, entre un motard (la victime) et un automobiliste, le conducteur du véhicule. Des échanges verbaux entre les deux étaient intervenus et le motard partait en cassant le rétroviseur de l’automobiliste.  S’en était suivi alors une course poursuite entre les deux au cours de laquelle, la voiture était rentrée en collision avec le conducteur de la motocyclette. Le motard décédait des suites du choc et de ses blessures.

Toute la question reposait de savoir si le choc – et non pas la poursuite – était volontaire ou pas.

Si le caractère volontaire du choc, donc des blessures, était retenu, l’automobiliste encourrait alors la peine de vingt ans de réclusion criminelle pour violences volontaires ayant entrainé la mort sans intention de la donner, ou au maximum cinq ans d’emprisonnement en cas de requalification pour simple homicide involontaire.

Trois jours de procès devant la Cour d’assises de Nanterre ont été nécessaires durant lesquels tous les éléments matériels de la scène « de crime » ont été débattus : appels aux secours du conducteur, témoignages oculaires à charge et à décharge, témoignages des proches de la victime et de l’accusé, analyse des vidéos de surveillances…

De nombreux experts réputés ont été appelés à la barre, sur réquisition du ministère public : expert en accidentologie, expert psychiatres, expert en toxicologie…

Tous les rapports d’experts ont vocation à éclairer le jury sur les circonstances exactes de l’accident et sur la personnalité de l’auteur.

Chaque partie au procès ont pu présenter des observations ou poser des questions, à tour de rôle : le magistrat, les jurés, l’avocat des parties civiles, l’avocat général, et, enfin, toujours en dernier, l’avocat de la défense.

Le dernier jour d’audience, l’avocat représentant l’intérêt des parties civiles a alors plaidé, les réquisitions de l’avocat général ont été exposées et enfin,  l’avocat de la défense a présenté une défense dans le cadre de sa plaidoirie.

Chaque partie s’est efforcée de reprendre tous les éléments débattus au cours de l’audience, et de construire « sa » version de l’accident : intentionnelle ou non intentionnelle

La dernière parole a été laissée à l’accusé comme la loi l’oblige, et il  a présenté à nouveau ses excuses à la famille du défunt comme la tradition l’y « oblige ».

Ce procès fait suite à une procédure d’instruction qui a duré pas moins de quatre années, au cours desquelles chaque élément matériel, chaque parole prononcée, a été recherché, analysé, interprété.

L’assistance d’un avocat, en plus d’être obligatoire, sera essentielle pour le conducteur qui entend échapper à une condamnation criminelle lourde.

L’avocat aura alors accès au dossier pénal, et pourra définir une stratégie de défense pour que soit prononcé soit un acquittement, soit une requalification des faits en homicide involontaire.

Si vous aviez à connaitre d’une telle procédure à votre encontre, sachez que le choix de votre avocat de la défense est crucial : il est le seul qui défendra vos intérêts, et l’intime conviction des jurés se forgera le plus souvent sur sa plaidoirie finale qui reprendra tous les éléments de procédure.

Le choix d’un avocat spécialisé en droit pénal routier (vérifiez néanmoins que ce dernier intervient régulièrement devant des Cours d’assises) peut se révéler être un atout majeur dans ce genre de situation. En effet, s’il est certain que le contentieux routier relève principalement du tribunal correctionnel, l’avocat spécialisé en droit pénal routier  détient, en plus de connaitre toutes les failles procédurales,  de solides connaissances techniques en matière d’accidentologie et de toxicologie. 

Les magistrats qui instruisent les dossiers en matière criminelle ne sont pas souvent confrontés contentieux routier, où l’intention criminelle peut paraitre absurde au regard de la futilité du mobile et où les rapports d’accidentologie sont extrêmement techniques (des dizaines de pages de calcul de vitesse, d’angles de trajectoires, de théories physiques…).

Le dernier jour du procès, celui où l’avocat de la défense plaide généralement pendant une heure, les jurés prennent leur décision. L’avocat de la défense devra prendre une plaidoirie qui s’efforcera de faire tomber, point par point, la théorie de l’accusation, d’éclairer les jurés sur la personnalité du conducteur, de proposer la requalification et/ ou des alternatives aux peines est en fait, un résumé de toute l’instruction et des débats organisés avec les experts et témoins.

L’essentiel est d’instaurer, sinon l’intime conviction de votre innocence (absence d’intention de choc), le doute chez les jurés, car le doute profite toujours à l’accusé en droit pénal.

Si vous deviez être poursuivi pour des violences volontaires ayant entrainé la mort sans intention de la donner, n’hésitez pas à confier votre défense à un cabinet d’avocats pratiquant régulièrement le droit pénal routier.

En cas de doute, n’hésitez pas à contacter votre avocat automobile pour une analyse de votre situation, sans engagement : www.benezra.fr

Michel BENEZRA, avocat

DROIT ROUTIER

2018-06-18T16:29:04+01:00
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